Ma vie d’élue #2 : Marie-Lise Gloanec, première adjointe de la commune d’Aigaliers (Gard) répond à nos questions !

“Le jour où il n’y aura plus de commune, il n’y aura plus d’élus et si on encourage pas les élus à se présenter, on donne le bâton pour se faire battre !”

Nous avons rencontré Marie-Lise Gloanec, élue du Gard depuis 2001, pour lui poser des questions sur son expérience d’élue, les raisons de son engagement dans l’Association des Maires Ruraux du Gard et sa vision du mandat local.

Pourquoi et comment êtes-vous devenue élue ? Pourquoi vous êtes-vous engagée ?

J’ai été élue en 2001, c’est mon quatrième mandat. Je venais de m’installer sur la commune quelques années auparavant. Je ne suis pas originaire de ce village mais le maire candidat avait entendu dire que je m'intéressais aux affaires de la cité. Il m’a donc proposé et j’ai accepté tout de suite. Cela me permettait de m’intégrer dans cette commune car il y a peu de lieux d’intégration. Venant de région parisienne, dans une commune très dynamique qui créait beaucoup de choses, je me rendais déjà aux dépouillements quand j’étais petite, cela m’intéressait. Pourtant, mes parents n’étaient pas du tout politisés. Je me suis toujours engagée au collège et au lycée. En tant que conseillère municipale, puis adjointe, je voulais agir dans l’intérêt de tout le monde, même en n'étant pas originaire de la commune. Maintenant, après quatre mandats, beaucoup de nouveaux habitants sont venus s’installer, d'autres personnes ont été élues. Le maire et le conseil ont fait en sorte que les gens s’intègrent le mieux possible entre les familles dites "anciennes" et les nouveaux arrivants.

Avez-vous noté des évolutions par rapport à l’engagement citoyen dans votre commune ? 

Lors de la constitution de l’équipe, on a fait le choix d’aller voir des personnes qui étaient arrivées récemment sur la commune autant que des familles plus anciennes et nous avons réussi à réunir suffisamment de volontaires. L’engagement n’est pas vraiment un problème. Mais nous sommes quand même passés de 11 à 15 élus, ce qui n’a pas été facile.

Par contre, je dirais que la difficulté majeure est la disponibilité et l’âge des élus. Personnellement, je suis à la retraite depuis quelques années mais quand je travaillais, c’était difficile d’être disponible pour la commune comme je peux l’être maintenant. Or, la moitié de nos élus sont jeunes et ont effectivement moins de temps. La question du temps des jeunes élus se pose puisque ce ne sont que des gens de mon âge qui peuvent assumer ou alors des salariés de la fonction publique qui peuvent demander du temps pour cela. Il y a toujours des gens qui ont envie de s’engager mais pas forcément des gens qui le peuvent. 

Quelles difficultés rencontrez-vous en tant qu'élue ?

Personnellement, je n’ai pas eu de difficulté particulière. Ce qui est compliqué, c’est la gestion des dossiers en lien avec les services de l’État, même si les agents font bien leur boulot. Les normes législatives ou les contraintes portées par l’État rendent les choses compliquées. On va souvent être obligés de demander une analyse à un cabinet d’étude et engager des sommes très importantes pour obtenir de l'ingénierie technique et juridique que les services départementaux et étatiques fournissaient auparavant. Je trouve que le recours à des cabinets d’étude rend la gestion des projets difficile et plus coûteuse. 

Est-ce que la formation vous a apporté quelque chose ?

En tant qu’élu, on est pas compétents sur tout ! Je suis complètement pour la formation, cela peut être une bonne entrée en matière pour des sujets, justement. Il y a des choses basiques comme le PLU que tous les élus devraient comprendre, même si on n'est pas en charge de cette compétence. Cela permet d’être en discussion avec des experts ou de construire nous mêmes notre PLU sans avoir à acheter un copié-collé d’un PLU ailleurs. Il est important d’avoir des bases pour parler en connaissance de cause.


Pouvez-vous nous parler d'un projet qui a fonctionné dans votre commune et/ou que vous êtes fière d'avoir porté ? 

On a mené plusieurs gros projets mais c’est le maire qui a beaucoup porté ça. Par contre, il y a un projet qui me tient à cœur, c’est celui d’un bassin avec une fontaine, un petit canal en pierre, un enclos embroussaillé, etc. L’endroit était très détérioré et plus personne n’y allait. Le conseil était convaincu de la nécessité de rénover ce bassin qui est sur un chemin de randonnée. Je me suis attelée aux dossiers de demande de subventions. Nous avons réalisé ce projet il y a maintenant deux ans et le site est devenu magnifique et très utilisé par les habitants qui ne l'utilisaient pas avant. Même les enfants et les jeunes y vont le weekend pour pique-niquer. Les gens sont ravis de la mise en valeur de ce site. 

Il vous a fallu combien de temps pour le mettre en place ?

Il a fallu environ trois ans pour le mettre en place. Un projet comme ça nécessite souvent de convaincre le conseil en présentant tous les enjeux, ce qui peut prendre du temps. Ensuite, il faut le financer parce que la commune ne peut pas tout faire avec ses moyens. Donc j’ai constitué un dossier auprès de la région, du département et de la communauté de communes en mettant l’accent sur la valorisation du vieux patrimoine vernaculaire. On a obtenu des subventions avec un autofinancement de la commune. Ensuite, il a fallu attendre l’accord de la subvention pour commencer. Et puis une fois tout cela fait, on a pu s’entendre avec les entreprises, selon les périodes. On a par exemple connu des difficultés sur les travaux avec les chaleurs de l’été. Cela a aussi été un peu interrompu avec le covid qui a retardé les accords de subventions mais tout est allé assez vite ensuite. 


Que diriez-vous à quelqu'un qui souhaite s'engager en tant qu'élu aux prochaines élections ?

Je dirais : allez-y ! ça c’est sûr. On peut parler du contexte difficile mais je trouve qu’on en fait beaucoup, même s’il y a des réalités difficiles que je ne conteste pas. Je trouve qu’il faut surtout dire que le mandat d’élu est passionnant. Le conseil municipal prend des décisions, les réalise et les habitants voient tout de suite ce qui a été fait ou pas. Cela a un impact immédiat !

Par rapport aux nouveaux élus, il y a la question du temps à accorder qu’il faut considérer. Mais des gens ont envie de s’engager et il faut les encourager et je veux mettre l’accent sur le fait qu’il faut se méfier à ne pas être trop négatif sur ce que peuvent faire les élus. Je pense que cela donne du grain à moudre à une orientation de l’Etat - qui n’est pas nouvelle - qui est de faire disparaître les communes. Le jour où il n’y aura plus de commune, il n’y aura plus d’élus et si on encourage pas les élus à se présenter, on donne le bâton pour se faire battre !

Je trouve que ce qui est intéressant en tant qu’élue c’est qu’on a affaire à des demandes individuelles de la part de personnes auxquelles on doit répondre de façon collective et pour l’intérêt général. Est-ce que ça va créer d’autres soucis avec d’autres personnes ? Est-ce que ça pose un problème légal ? Je trouve ça passionnant. J’ai appris énormément de choses. Bien sûr, il faut un premier mandat où on apprend beaucoup de choses, où on se forme mais j’ai eu la chance d’avoir un maire qui transmet et est très à l’écoute et j’ai beaucoup découvert sur le plan technique, sur la voirie, la gestion du système électrique, du téléphone, etc. 

En plus, la commune n’est pas seule, elle est avec d’autres territoires, ce qui amène des passerelles. C’est important de tenir compte de son territoire et d’agir dans cette dimension là. C'est pourquoi, je me suis engagée au sein de l'Association des Maires Ruraux du Gard car je crois à la pertinence des communes rurales.

Ensuite, il faut laisser la place aux jeunes ; j’espère que certains voudront s’investir ! C’est une question d’envie et de temps.